Réforme des retraites : quelles étapes ont été franchies fin 2019 et début 2020
L’ancien secrétaire d'État chargé des retraites, Jean-Paul Delevoye, a dévoilé en juillet 2019, après plus de 18 mois de concertations, ses préconisations pour l'instauration du futur régime universel des retraites par répartition et par points. Ces préconisations constituent les grandes lignes de la réforme des retraites.
Après une nouvelle négociation avec les partenaires sociaux à l'automne 2019, le projet de réforme des retraites a été présenté par le Premier ministre le 11 décembre 2019. Ce projet s’est heurté à l’opposition des syndicats de travailleurs, y compris des syndicats réformistes pourtant favorables au régime universel de retraite par points. Ces derniers se sont opposés à la mesure d’âge du projet : cette mesure de court terme instaurait un « âge pivot » fixé progressivement entre 2022 et 2027 de 62 ans et 4 mois à 64 ans, avec un système de malus pour ceux qui partent à la retraite avant l’âge pivot et de bonus pour ceux qui partent après. Cette mesure était destinée à inciter les actifs à cotiser plus longtemps afin de contribuer à l’équilibre du financement du système des retraites qui, à défaut, continuera à être largement déficitaire.
Dans le cadre des négociations menées avec les syndicats réformistes, le Gouvernement a accepté, le 11 janvier dernier, de retirer provisoirement du projet de réforme des retraites la mise en place de l'âge pivot dès 2022. Il a toutefois assorti ce retrait de l'obligation pour les partenaires sociaux, à travers une « conférence sur l'équilibre et le financement des retraites » , de dégager des mesures permettant à l’ensemble des régimes de retraite de base d’être à l'équilibre en 2027 (et donc de combler un besoin de financement d'ici 2027 de 12 milliards d'euros). La conférence, installée par le Premier ministre le 30 janvier, doit proposer ces mesures fin avril 2020 afin que celles-ci puissent être prises en compte avant le vote du projet de loi en seconde lecture.
Que contient le projet de loi instaurant un régime universel
Le Gouvernement a présenté en Conseil des ministres le 24 janvier dernier ses projets de lois (organique et ordinaire) instituant un système universel de retraite accompagnés d’une étude d’impact de la réforme. Voici les grandes lignes de ce projet avant de probables modifications lors du processus d’adoption parlementaire qui doit débuter le 17 février prochain. Par ailleurs, plusieurs dizaines d’ordonnances issues des négociations avec les partenaires sociaux seront nécessaires pour assurer la transition effective vers le nouveau régime universel.
Un régime universel de retraite
Le système universel de retraite, qui remplacera les 42 régimes de retraite actuels, comprendra un seul étage (sans distinction d’un régime de base et d’un régime complémentaire), obligatoire, par répartition et par points. Le système restera financé par répartition: comme dans le système actuel, les cotisations versées par les actifs financeront les pensions des retraités.
Actifs concernés par le régime universel
La génération née en 2004, qui fêtera ses 18 ans en 2022, sera la première à intégrer pleinement le système universel. Pour les autres assurés, le système universel s'appliquera aux années travaillées à compter de 2025 pour les assurés qui commenceront à partir à la retraite à partir de 2037 (assurés de la génération 1975) ; les droits constitués avant 2025 par ces assurés dans l’ancien système de retraite seront garantis à 100 %. Le système universel ne s’appliquera ni aux retraités actuels, ni aux personnes qui sont à moins de 17 ans de leur départ en retraite en 2020 (générations d’avant 1975).
Un système de retraite par points
Chaque euro cotisé ouvrira les mêmes droits à la retraite, quel que soit le statut du travailleur et dès la première heure travaillée. Le montant de la retraite sera égal au nombre de points acquis tout au long de la carrière multiplié par la valeur de service du point. Celle-ci ne pourra pas baisser au fil des années. Elle sera fixée par les partenaires sociaux (Caisse nationale de retraite universelle) et indexée sur les salaires (et non sur les prix). Chaque Français aura un qui lui permettra de savoir à tout moment où il en est de sa pension future dans le système universel.
Âge de départ à la retraite
L’âge minimum auquel il est possible de partir à la retraite sera maintenu à 62 ans. Toutefois, un « âge d’équilibre » déterminera l’âge auquel les assurés pourront toucher une retraite à taux plein. Ceux qui partent avant l’âge d’équilibre auront une pension de retraite moindre (décote de 5 % par année d'anticipation) et ceux qui partent après auront une pension majorée (bonus de 5 % pour chaque année supplémentaire travaillée). Selon l’étude d’impact, l’âge d’équilibre pourrait être fixé à 65 ans pour la génération 1975 qui pourra partir à la retraite en 2037. Cet âge correspond à l’âge moyen auquel cette génération partira à la retraite d’après les projections du Conseil d’orientation des retraites. L’âge d’équilibre évoluera par la suite afin de tenir compte de l’évolution de l’espérance de vie et sera fixé par les partenaires sociaux. Il pourra être adapté pour les métiers pénibles et les carrières longues.
Cotisations des indépendants
Un barème de cotisation identique sera applicable à l’ensemble des travailleurs non-salariés (exploitants agricoles, indépendants et professions libérales). Il sera adapté afin d’éviter une hausse brutale de leurs charges (entre 1 et 3 PASS, ils ne s’acquitteront que de l’équivalent des cotisations salariales). Ces modifications s’appliqueront progressivement pour tenir compte des situations de départ. Une réforme de l’assiette globale permettra d’annuler ou de lisser les effets de ces changements : la CSG diminuera afin de faire évoluer le taux de cotisation vieillesse.
Mesures pour les familles
Les parents bénéficieront d'une majoration de 5 % de leur pension pour chaque naissance ou adoption, avec un supplément de 2 % au troisième enfant. Les départs anticipés sous forme de trimestres gratuits vont disparaître. Le régime de la pension de réversion sera transformé par la nouvelle loi. La réversion garantira au survivant 70 % des points de retraite acquis par le couple. Elle sera réservée aux couples mariés, sera supprimée en cas de remariage et pourra être versée à partir de 55 ans.
Pension pour les travailleurs modestes
Une personne qui a travaillé pendant une carrière complète avec des salaires proches du SMIC pourra bénéficier d'un complément de points qui revalorisera sa pension à 1 000 € nets en 2022, soit 82 % du SMIC. Ce montant sera revalorisé afin d'atteindre 85 % du SMIC en 2025.
Mesures pour assurer l’équilibre financier du système des retraites
Le projet de loi octroie au Gouvernement l’autorisation de prendre par ordonnance toute mesure permettant d'assurer l'équilibre du système de retraite à l'horizon 2027. Si la conférence sur l'équilibre et le financement des retraites parvient à un accord d'ici à fin avril 2020, le Gouvernement prendra une ordonnance transcrivant cet accord dans la loi. Sinon, le Gouvernement décidera seul des mesures à prendre, à savoir probablement une mesure d'âge à court terme.
Calendrier prévisionnel de la réforme des retraites
Février 2020: examen du projet de loi de réforme des retraites en première lecture à l'Assemblée nationale
Avril 2020: fin de la conférence sur l'équilibre et le financement des retraites
Courant 2020: adoption définitive de la loi au Parlement
2022: entrée dans le régime universel de tous les cotisants nés à partir de 2004
2025: entrée dans le régime universel de tous les assurés nés à partir de 1975
2037 : premiers départs à la retraite de personnes dans le régime universel.
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- Les 6 points clés de la réforme des retraites
- Réforme des retraites : les dernières annonces d’Emmanuel Macron ;
- les grandes orientations de la réforme des retraites